La mémoire, lourde de souvenirs effroyables de la tragédie rwandaise, a conduit Adélaïde Mukantabana à se battre avec les mots de la langue française, à ouvrir les mots du kinyarwanda, la langue rwandaise, pour en faire sortir la souffrance et la vie, enfin, à se reconstruire douloureusement mot à mot. Seul moyen pour elle de lutter contre l'absence brutale de ses deux aînés et de tout le reste de sa famille massacrée au milieu d'autres Tutsi, à
Nyange, fin avril 1994.
L'alchimie de l'imagination et de la mémoire se réalisant, elle nous fait traverser toute l'étendue de l'orgie génocidaire dans une narration singulière qu'irriguent deux veines : l'une historique, l'autre autobiographique. Quand elle démasque les impostures de l'Église catholique rwandaise, celles du dictateur Habyarimana, celles de la politique française, et quand elle dénonce la folie exterminatrice d'une bande d'intellectuels du Hutu Power, elle perce à jour de troublantes vérités.
D'autre part, dans cette quête du passé le plus secret, le plus poignant, le plus vif de son Moi, elle lance au monde un appel infini à retrouver l'amour de l'humain. La sincérité totale de l'expression et de l'esprit, associée à l'acuité de la perception, donne à ses propos et à son récit une saveur merveilleuse, mais aussi une force capable de réveiller les consciences.
Adélaïde MUKANTABANA habite à Bègles, une banlieue bordelaise, depuis novembre 1994. En 1995, elle a déposé une plainte contre le médecin rwandais soupçonné de participation au génocide sur la colline de Tumba, à Butare, au Rwanda. Membre fondatrice de l'association Ibuka-France "Souviens-toi", elle a participé à la création de l'association Cauri depuis 2004, dont elle est actuellement présidente. L'objectif principal de Cauri est de rechercher la vérité, d'informer et de soutenir la mémoire du génocide des Tutsi rwandais.